Pacte civil de solidarité [Pacs]
Pacte civil de
solidarité [Pacs], contrat civil institué par la loi n°99-944 du
15 novembre 1999, qui confère une validité légale à l’union libre de partenaires
majeurs du même sexe ou de sexes opposés.
Dès la fin des années 1980, un rapport du
Conseil de l’Europe insiste sur la nécessité de donner un statut légal au
concubinage. La Commission des lois de l’Assemblée nationale dépose un projet
dans ce sens, qui est transformé, en septembre 1998, en proposition de loi
inscrite à l’ordre du jour. Le texte est âprement discuté et finalement adopté
par l’Assemblée le 13 octobre 1999.
Les débats houleux qui marquent la présentation
de ce texte à l’Assemblée tiennent au fait qu’il soulève une nette opposition de
la part de divers groupes d’opinion, attachés aux valeurs familiales
traditionnelles, qui craignent de voir le Pacs concurrencer le mariage comme
institution fondatrice de la famille en droit français. Il révèle également la
réticence de certains parlementaires à reconnaître légalement le couple
homosexuel. Le Conseil constitutionnel, dans sa décision 99-419 du 9 novembre
1999, le déclare néanmoins conforme à la Constitution, non sans formuler des
réserves d’interprétation qui laissent augurer des problèmes auxquels se
heurteront les juges lorsqu’ils auront à traiter du Pacs.
La loi du 15 novembre 1999 introduit un
titre XII dans le Code civil, intitulé « du pacte civil de solidarité et du
concubinage ». Cette loi modifie en outre d’autres textes, fiscaux et sociaux,
pour les adapter aux couples unis par un tel pacte. On doit noter que, faute de
consultation des assemblées territoriales, le Pacs n’est pas applicable dans les
territoires d’outre-mer.
Dans le Code civil, le Pacs est régi par les
articles 515-1 à 515-7. Il s’agit d’« un contrat conclu par deux personnes
physiques majeures, de sexe différent ou de même sexe, pour organiser leur vie
commune » (art. 515-1). Cette définition est importante, car elle souligne que
le Pacs ne vise qu’à organiser les conditions patrimoniales de la vie commune.
Il ne permet pas, contrairement au mariage, la constitution d’une véritable
famille.
Il résulte de cette définition que le Pacs
doit d’abord répondre aux conditions de validité des contrats en général. À ce
titre, le consentement des parties au Pacs doit être exempt de vice et la cause
de l’engagement licite.
Le pacte ne peut être conclu que par deux
personnes physiques majeures. La pleine capacité civile du mineur émancipé
devrait cependant lui permettre de conclure un Pacs. Les majeurs en tutelle ne
peuvent pas conclure un Pacs (nouvel article 506-1 du Code civil). Les majeurs
en curatelle, quant à eux, n’ont pas fait l’objet de dispositions spécifiques.
Le sexe des parties au Pacs est indifférent, puisque le texte a été adopté
notamment pour permettre aux couples homosexuels de se doter d’un statut
juridique.
Enfin, est frappé de nullité (art. 512-2) le
Pacs conclu entre ascendant et descendant en ligne directe (parents-enfants),
entre alliés en ligne directe (parents par alliance) et entre collatéraux
jusqu’au troisième degré inclus (frères et sœurs, oncles, cousins, etc.) Sont
ainsi exclues du Pacs les fratries, alors qu’il avait été envisagé de le leur
ouvrir. De même est nul le Pacs conclu par une personne qui est déjà mariée ou
déjà liée par un Pacs. Le principe de monogamie est ainsi sauvegardé.
Le pacte est conclu librement entre les
partenaires, mais, pour être doté d’effets vis-à-vis des tiers, il doit faire
l’objet d’une déclaration au greffe du tribunal d’instance de leur résidence
commune (art. 512-3). Si le Pacs est passé à l’étranger par des partenaires dont
l’un est de nationalité française, c’est l’ambassade ou le consulat de France
qui est chargé des formalités. Lors de cette déclaration, les parties doivent
remettre au greffier, en double original, la convention qu’elles ont conclue
ainsi que les pièces d’état civil qui permettent de vérifier qu’elles peuvent
librement conclure cet acte (extrait de naissance). Le greffier inscrit alors
cette déclaration sur un registre, vise et date les deux originaux et les
restitue aux parties. Il informe, par ailleurs, le greffe du tribunal d’instance
du lieu de naissance de chacune des deux parties de l’enregistrement du Pacs.
Cette inscription confère au Pacs date certaine et le rend opposable aux tiers.
De même, toutes les modifications que les parties apporteront au Pacs devront
être déclarées au greffe de cette manière.
3.2.1 |
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Effets du Pacs au plan
civil |
Les partenaires sont libres de définir
leurs relations. Cependant la conclusion d’un Pacs entraîne des obligations
minimales. Les partenaires se doivent d’abord « aide mutuelle et matérielle »
(art. 515-4). Par ailleurs, ils sont solidairement responsables des dettes
contractées par l’un d’eux pour les besoins de la vie courante et pour les
dépenses relatives au logement commun. À cet égard, l’article 515-4 apparaît
plus sévère que l’article 220 du Code civil qui concerne les époux. En effet, ni
les dépenses manifestement excessives ni les emprunts ne sont exclus du domaine
de la solidarité. Quant aux biens acquis par eux durant leur vie commune, les
partenaires peuvent opter pour l’indivision des meubles meublants. À défaut, ces
meubles sont présumés indivis par moitié comme le sont les autres biens si
l’acte d’acquisition ou de disposition ne prévoit rien d’autre
(art. 515-5).
La conclusion d’un Pacs avec un partenaire
français est également un élément qui permet l’obtention d’un titre de séjour au
partenaire étranger (art. 12 bis alinéa 7 de l’ordonnance du 2 novembre
1945).
Enfin, les dispositions qui permettent au
conjoint de bénéficier du maintien du bail sont étendues au partenaire. Ainsi,
ce dernier bénéficie de la continuation du bail en cas d’abandon du domicile par
le locataire (art. 14 alinéa 4 de la loi du 6 juillet 1989) et du transfert du
bail en cas de décès du locataire (art. 14 alinéa 8). En contrepartie, il peut
se voir imposer la reprise du bail par le bailleur dans les conditions
ordinaires (art. 15 alinéa 1).
3.2.2 |
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Effets du Pacs au plan
fiscal |
Le Code général des impôts (CGI) est
modifié en divers points pour intégrer le Pacs à ses prévisions. Ainsi,
l’article 6-1 du CGI prévoit pour les partenaires une imposition commune à
partir du troisième anniversaire de l’enregistrement de leur Pacs, que ce soit
en matière d’impôt sur le revenu, en matière d’impôt de solidarité sur la
fortune ou en matière d’impôts directs locaux (art. 885 A alinéa 5,
art. 885 W II et art. 1723 ter 00B du CGI).
Les droits de succession et les donations
sont également aménagés pour les partenaires du Pacs. Ainsi, ils bénéficient
d’un abattement de 375 000 F, à compter du 1er janvier 2000
(art. 779-III du CGI). Au-delà, la fraction de 100 000 F est soumise à un taux
de 40 p. 100, puis de 50 p. 100 pour la fraction supérieure (art. 777 bis du
CGI). On doit cependant noter que ce régime n’est applicable en cas de donation
que si les partenaires sont liés depuis au moins deux ans par leur Pacs. Aucune
condition de délai n’est en revanche requise en matière de succession.
3.2.3 |
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Effets du Pacs au plan
social |
La loi permet au partenaire
de bénéficier de la qualité d’ayant droit de
l’assuré, pour les prestations d’assurances maladie
et maternité (art. L. 161-14, alinéa 1 du
Code de la sécurité sociale, CSS). Le capital
décès lui est également attribué à
défaut d’autres priorités (art. L. 361-4
CSS). Il a, en outre, droit aux congés accordés par le
Code du travail à l’époux : droit au
congé simultané (art. L. 223-7 du Code du
travail), autorisation exceptionnelle d’absence de deux jours en
cas de décès du partenaire (art. L. 226-1
alinéa 4). S’il est fonctionnaire, il peut enfin se
prévaloir du Pacs pour bénéficier d’une
priorité d’affectation, de mutation ou d’un
détachement.
Il faut cependant remarquer que le
partenaire ne s’est pas vu étendre le bénéfice de l’allocation de soutien
familial (art. L. 523-2 CSS) ni de l’allocation de veuvage (art. L. 356-3,1
CSS).
Les partenaires peuvent mettre fin au
Pacs d’un commun accord (art. 515-7). Ils en font alors la déclaration conjointe
au greffe du tribunal du domicile de l’un d’entre eux, et le Pacs prend fin dès
que le greffier enregistre la déclaration.
Un seul des partenaires peut également
mettre fin au Pacs. Dans ce cas, il signifie sa décision à son partenaire et
adresse la copie de cette signification au greffe du tribunal qui a enregistré
le Pacs. Le Pacs cesse trois mois après la signification.
Le Pacs prend également fin par le
mariage ou par le décès de l’un des deux partenaires. Il cesse alors dès ce
mariage ou dès ce décès.
Les conséquences de la cessation du Pacs
sont laissées à l’appréciation des partenaires. Ils doivent donc liquider leurs
droits et obligations. À défaut d’accord entre eux, c’est au juge de statuer sur
les conséquences patrimoniales de la rupture, y compris sur la réparation du
préjudice éventuellement subi par l’un des partenaires. En tout état de cause,
l’un des partenaires pourra invoquer le bénéfice de l’article 832 du Code civil
qui lui permet de se voir attribuer un lot homogène. Il faut noter que les
exploitations agricoles ont été exclues de cette possibilité.
Les conséquences fiscales de la cessation
du Pacs sont les suivantes (art. 6-7 du CGI) : chaque partenaire est imposé
séparément pour l’année au cours de laquelle le Pacs a pris fin, sauf lorsque le
Pacs cesse du fait du mariage des partenaires entre eux, auquel cas ils
demeurent soumis à l’imposition commune, et sauf lorsque le Pacs cesse par le
décès d’un des partenaires, auquel cas le survivant est responsable pour la
période antérieure au décès.
C’est principalement vis-à-vis des tiers que
le Pacs innove. Il permet, en effet, aux partenaires d’obtenir certains droits
qui étaient jusque-là réservés aux couples mariés ou aux concubins
hétérosexuels. Si la reconnaissance de l’union homosexuelle constitue donc
l’apport majeur de ce texte, il ne s’agit toutefois que d’une reconnaissance des
droits patrimoniaux de ces couples. Les partenaires liés par un Pacs ne sont en
aucun cas considérés comme un couple marié ou comme un couple de concubins
hétérosexuels pour tout ce qui concerne la fondation d’une famille et les droits
et devoirs qui en résultent. Ainsi, seuls les biens des partenaires font l’objet
de dispositions, qu’il s’agisse de déterminer les obligations des partenaires
vis-à-vis des tiers pendant leur union (obligation solidaire pour les dépenses
de la vie commune) ou qu’il s’agisse de déterminer leurs droits sur ces biens
vis-à-vis des tiers (droit au bail, droits de succession, droit à certaines
prestations sociales) ou entre les partenaires (régime des biens acquis pendant
l’union et sort de ces biens à la cessation du Pacs). Les dispositions relatives
aux priorités d’affectation, de mutation ou au détachement en matière de
travail, ainsi que la prise en compte du Pacs pour la délivrance d’un titre de
séjour sont les seules à donner des conséquences extra-patrimoniales au
pacte.
En résumé, le couple « pacsé » n’est pas égal
au couple marié, ni au couple de concubins hétérosexuels à qui des droits
extra-patrimoniaux sont reconnus. Il permet cependant, dans les limites admises
par la loi, de mieux organiser ces unions.
La loi du 15 novembre 1999 donne d’ailleurs
une définition du concubinage, insérée à l’article 515-8 du Code civil. Le
concubinage « est une union de fait, caractérisée par une vie commune présentant
un caractère de stabilité et de continuité entre deux personnes, de sexe
différent ou de même sexe, qui vivent en couple. »
Cette définition reprend la jurisprudence
antérieure et permet d’étendre aux concubins homosexuels divers droits reconnus
aux autres concubins.
On doit cependant noter que le concubinage,
qu’il soit homosexuel ou hétérosexuel, n’ouvre notamment pas le bénéfice des
dispositions fiscales prévues en matière de Pacs. Ce contrat offre donc des
avantages certains en matière de droits de succession et de donations.
L’utilité du Pacs semble être en tout état de
cause démontrée par la progression du nombre de contrats enregistrés depuis sa
création : entre novembre 1999 et septembre 2004, plus de 130 000 Pacs ont été
conclus. S’il est accepté par la société comme une nouvelle forme de
conjugalité, le Pacs continue d’être débattu. De nombreux pacsés ou futurs
pacsés réclament en effet un élargissement des droits juridiques du Pacs, en
particulier en cas de décès d’un des partenaires (notamment le versement d’une
pension de réversion au partenaire survivant, comme pour les couples mariés).
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